Le microbiote intestinal
Notre ventre, abri du système nerveux entérique, contient 200 millions de
neurones, qui, selon des recherches récentes, joueraient un rôle sur l'ensemble
de notre corps, en interaction avec le cerveau. Mais nos intestins abritent une
autre richesse souvent sous-estimée : le microbiote intestinal,
soit environ 100.000 milliards de bactéries. Ces dernières auraient un impact
sur notre santé et pourraient devenir vecteur de soins.
Le microbiote intestinal –
auparavant appelé flore intestinale - regroupe 100.000 milliards de bactéries,
au cœur de notre organisme. Concrètement, cela correspond de dix à cent fois
plus de bactéries que l'ensemble des cellules que contient notre organisme. Des
centaines d'espèces de bactéries, influençant notre quotidien.
On distingue différents grands groupes de bactéries avec des fonctions
différentes. Leurs rôles s'exercent au niveau des interfaces avec l'aliment,
les bactéries de l'environnement ou les cellules humaines, notamment en terme
de contribution à la dégradation des composés alimentaires. Certaines bactéries
vont par exemple dégrader les fibres ou participer à la fermentation,
contribuant ainsi aux sources d'énergie pour l'hôte. D'autres jouent un rôle de
protection contre les bactéries pathogènes, d'autres encore stimulent le
renouvellement de la paroi intestinale et du mucus ou nos systèmes de défenses
naturelles. Elles ont donc un effet bénéfique sur la flore, l'intestin et
l'organisme tout entier.
Grâce à l'étude des selles, on peut désormais déterminer la composition de
l'intestin. Chez l'être humain, le microbiote se classe en trois entéro-types
différents, qui se dessinent dans les premières années de la vie. « Le
rôle de la mère dans la constitution du microbiote intestinal est important. On
retrouve des souches d'origine maternelle chez le nouveau-né, qui proviennent
du microbiote intestinal et vaginal de la mère. Même si c'est simplifié, c'est
un bagage, avec des éléments déterminants de ce que sera le microbiote de
l'adulte », détaille Joël Doré. Il se stabilise vers trois ans et
se régénère rapidement, même en cas de stress majeur, comme un traitement
antibiotique par exemple. « Ensuite, si le microbiote est stable
pendant la plus grande partie de la vie, on a l'impression qu'il y a une dérive
chez la personne âgée ou très âgée. Avec néanmoins un impact des dérives des
pratiques alimentaires. »
Une source de
diagnostique ?
Une étude du
microbiote intestinal des individus permet par ailleurs de relever certaines
anomalies ou maladies. Dans le cas, notamment, de certaines maladies immunes,
métaboliques ou auto-immunes, « On a suspecté un lien avec le
microbiote », rapporte Joël Doré. « Depuis les années 1990, à
l'INRA, on étudie les maladies inflammatoires de l'intestin. Dans le cas
de la maladie de Crohn, on a constaté une déviance du microbiote,
avec des bactéries absentes ou sous-représentées. Dans le cas de plusieurs
maladies immunes, on a noté un lien entre la détérioration de la composition du
microbiote et l'installation des maladies chroniques. »
Dans le même ordre d'idée, des liens ont été mis en évidence entre les
bactéries intestinales et le système nerveux central. Notamment sur la régulation du taux de sérotonine, elle-même, jouant sur notre humeur. « On a constaté, par
exemple, chez les souris, que le niveau d'anxiété pouvait être impacté par le
microbiote. », explique Joël Doré. En les privant de certaines
bactéries, ces souris avaient de gros troubles de la production de sérotonine,
et étaient plus anxieuses que leurs congénères. A l'inverse, l'injection de
microbiote améliorait la situation.
Ainsi, « les conséquences vont donc au-delà du système
digestif », note Joël Doré. « Il y a presque dix ans, les
équipes de Jeff Gordon avaient mis en lien avec l’obésité. Mais des études
s'intéressent également aux conséquences du microbiote sur des maladies
inflammatoires, le diabète ou encore les allergies. Donc des pathologies pas
forcément centrées sur l'intestin. On explore aujourd'hui des maladies
psychiatriques. »
De nouvelles
pistes de traitement ?
Ces découvertes ouvrent donc de nouvelles pistes thérapeutiques, où les
bactéries pourraient venir en complément des traitements actuels. Une des
pistes les plus simples réside dans l'apport de bactéries vivantes, via les
probiotiques, par exemple. Cependant, tous les produits laitiers enrichis en
probiotiques n'ont pas fait – pour le moment en tout cas – leurs preuves, et ne
peuvent être considérés comme des médicaments.
Dans le cas de pathologies plus lourdes, avec un microbiote fortement
déséquilibré, des chercheurs australiens ont testé le transfert d'extraits
fécaux de personnes saines dans l'intestin de patients malades. Cela s'applique
notamment dans le cas de la lutte contre le Clostridium
difficile. En inoculant le microbiote d'un donneur, on procède ainsi à une
transplantation de microbiote. Une piste explorée également en Europe, et qui
pourrait s'étendre à d'autres pathologies.
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